82 ans pour l'ancien Moonta
Ensablé au Barcarès en 1967, le Lydia a d’abord été un paquebot de
croisière, construit au Danemark en 1931, naviguant dans les mers
australiennes puis en Méditerranée sous pavillon grec. Le Moonta. Ce nom
ne vous dit peut-être rien. Pourtant il fait partie du paysage du
littoral roussillonnais et sa réputation dépasse largement les
frontières du département et même de l’hexagone. C’est que l’histoire du
paquebot des sables, qui n’a été rebaptisé le Lydia qu’en 1955, est
aussi riche que méconnue.
La grande histoire du Lydia débute au Danemark. La
compagnie australienne The Adelaide Steamship commande un bateau de
croisière aux chantiers navals Burmeister and Wain, basés à Copenhague. « La question qu’on peut se poser, c’est pourquoi une compagnie australienne fait-elle construire son bateau au Danemark, souligne Jacques Hiron, auteur du livre Le paquebot des sables, qui raconte l’histoire du Lydia de façon romancée. C’est parce que Burmeister and Wain avait négocié avec M. Diesel et était la seule à construire des moteurs de bateau diesel ».
Nous sommes en 1931 et le Moonta (du nom d’une petite ville du sud de
l’Australie) fait déjà son plus long voyage. Au départ de Copenhague,
après une escale à Londres, il rejoint son port d’attache : Adelaide. Le
voyage dure un mois et demi.
Le 28 novembre 1931, le Moonta prend la mer pour son premier « Gulf Trip
». Une croisière qu’il effectuera chaque semaine jusqu’en 1955. Le
voyage est long de 720 milles, dure six jours, comporte six escales et
coûte seulement six livres australiennes par passager (soit moins de dix
euros) ! Il dessert le golfe Spencer, au sud de l’Australie.
Le Moonta, long de 91 mètres et capable d’accueillir 157 passagers, est
alors un paquebot mixte puisqu’il transporte également du fret. Ce qui
explique le prix dérisoire de la croisière, qui pousse un grand nombre
de couples à choisir le navire pour leur voyage de noce. Pendant sa
période australienne, le Moonta a également été équipé d’un... canon. Le
16 avril 1943, en pleine Seconde Guerre mondiale, un 12 pounder est
installé sur sa poupe. Le paquebot n’en aura finalement jamais besoin.
Le Moonta assure le service du « gulf trip » jusqu’en 1955. « A
cette époque-là, les transports aériens et les routes se développent,
note Jacques Hiron. Le bateau est mis en vente et racheté par les Grecs ».
La Hellenic Mediterranean Lines, nouvelle propriétaire du Moonta,
renomme le paquebot qui devient le Lydia, du nom d’une ancienne province
grecque. Surtout, le nouvel exploitant du navire fait passer sa
capacité d’accueil de 157 à 460 passagers, notamment en réaménagent le
pont avant. Au départ du Pirée, le Lydia reprend du service à travers la
Méditerranée. Il dessert alors Alexandrie, Limassol, Beyrouth, Port-Said, Naples, Gênes et Marseille. C’est dans la cité phocéenne qu’il finit sa carrière en 1967, usé.
Il est alors racheté par la Semeta des Pyrénées-Orientales qui décide
d’en faire l’attraction principale de Port-Barcarès, alors en plein
développement quatre ans après le début de la Mission Racine.
Le 11 juin 1967, le Lydia est ensablé, trois mètres au-dessus du niveau
de la mer. Il trône toujours sur la plage du Barcarès 46 ans plus tard.
Et à 82 printemps, il est le plus vieux paquebot visible en Europe.